"Mon Dieu, donne-moi le courage d’accepter ce que je ne peux pas changer, la force de changer ce qui peut l’être et la sagesse de distinguer l’un de l’autre" Marc Aurèle
L’être humain flotte comme il peut au confluant de multiples influences, histoires familiale passées et présentes, croyances, une foule d’habitude, les contingences du quotidien etc. Un problème dans la vie d’un patient peut être le fruit d’un courant unique comme de plusieurs dont certains sous marins échappent à une évaluation rapide de la situation de la part du Thérapeute. C’est pour cela que ce dernier même très compétant ne peut garantir de l’issue d’un accompagnement.
Chaque mode de traitement appréhende la situation d’un patient au travers d’un filtre et d’une ouverture qui lui est propre, il n’y a pas de panacée universelle qui prend l’être à tous les niveaux, dans toutes ces dimensions, pour cela il faudrait combiner plusieurs approches et passer un temps presque infini avec le patient. De plus a force de se disperser certains thérapeutes, finissent par n’avoir aucune réelle expertise, « qui trop embrasse mal étreint » comme on dit. J’aimerai discuter des angles morts inhérents à une approche limitée en temps et par le choix d’une technique.
Dans le cadre d’une thérapie verbale classique (psychanalyse et dérivées), le fait de pouvoir parler de tout ce qui nous préoccupe à une personne neutre voir acceptante a un effet soulageant, et donc même si l’objet de la thérapie n’est pas traité, le patient se sent en général bien mieux. Dans le cadre de l’hypnothérapie nous ne bénéficions pas de ce genre d’avantage (des fois qualifiés de cache misère), nous travaillons vers un but très précis avec un temps très limité, et à terme échu soit l’objectif est atteint soit il ne l’est pas. A l’issue de sa formation l’hypnothérapeute sort munit d’une belle boite à outil, le problème c’est que si il reste dans une mentalité de technicien, il va vite se casser les dents car même très bien exécutées les techniques ne produisent pas les effets escomptés lors d’une proportion non négligeable de cas. Situation aux effets qui peuvent être dévastateurs sur le moral des parties impliquées, mais aussi à la réputation / statu du thérapeute.
Pour que la séance d’hypnose soit efficace, il faut que le thérapeute établisse un rapport (relation de sympathie) avec le patient, il faut que ce dernier se sente consciemment comme inconsciemment, accepté, respecté, en sureté, entre les mains de quelqu’un de compétant. Ces conditions sont très importantes car en plus de payer un montant non négligeable, il doit s’ouvrir, retrouver une certaine vulnérabilité mentale. Il est donc important que le patient croie qu’on peut faire quelque chose pour lui. C’est pour cela qu’il faut prendre quelques précautions pour qu’un patient ne nous voie jamais nous vautré en beauté.
Certains problème promettent une résolution en un nombre fixé de séance : arrête de cigarette en 2 séances, perte de poids en 4 etc, certaines personnes trouveront que ça sent le racolage d’autre que c’est la preuve qu’ils sont super forts si ils peuvent le promettre. J’imagine que cette manière de se présenter attire une clientèle en adéquation avec l’éthique du thérapeute en question. En dehors de ça, il y a toujours le problème de ces petites conditions qu’on a tendance à zapper quand on lit le contrat et qui couvrent ainsi l’opérateur. En tout cas je ne promets pas de résultats encore moins en un temps fixé, des fois l’inconscient n’a besoin que d’un petit coup de pouce et ça sera plus rapide que prévu, des fois il y a un sacrés sac de nœud et tirer ça au clair peut être long. Pour moi l’acte thérapeutique est un peu comme de la plomberie, la personne viens nous voir pour une fuite des fois c’est simple, on change la pièce et c’est terminé, mais d’autre fois réparer la section qui est crevée ne va pas servir à grand-chose si les joints pourris ne sont pas remplacé, de plus si la pression est trop forte pour le système et que l’on empêche l’excès de pression de s’écouler à travers le trou, ça va sans doute causer de nouveaux soucis. Pendant qu’on s’occupe du problème de pression ça continue de fuir, pourtant on avance dans la bonne direction.
Faire de l’hypnose Ericksonnienne est un peu complexe, on travail main dans la main avec l’inconscient mais on a des moyens assez limités de communiquer avec lui, par moment on a l’impression de travailler à l’aveuglette ce qui est gênant quand on s’occupe de problèmes complexes. Une bonne partie des techniques héritées d’Erickson sollicitent l’inconscient pour lui demander de trouver de nouvelles stratégies/comportements plus efficaces pour le patient. On a tendance à s’adresser à lui comme si c’était une sorte de dieu/esclave omniscient et omnipotent, alors que finalement on n’arrive même pas à le définir de manière sérieuse. Alors des fois ça marche des fois ça ne marche pas.
Personnellement j’ai tendance à prendre plutôt mal l’échec (en thérapie comme ailleurs). J’ai beau recadrer, parler de feed-back, de contretemps, de réussite dans l’élimination d’une voie qui ne fonctionne pas, ça reste désagréable. Je pense que pour devenir un meilleurs thérapeute je dois me décharger de cette émotion et de ce qu’elle reflète (tu trouves ta valeur dans la réussite) et j’ai ma petite idées sur ce qu’il faut que je fasse pour y arriver. Vivre dans la peur de l’échec, c’est finir par ne faire que ce qui a le meilleur taux de réussite, c’est se couper de sa créativité, c’est vivre avec un bruit de fond tel que l’on ne peut plus entendre ses intuitions. Vivre la citation de Marc Aurèle dans l’esprit, comme dans le cœur n’est possible que lorsqu’on a fait un certain nettoyage émotionnel.
Pour ce qui est du patient, tout d’abord dès le départ pas de promesse mais je n’évoque pas la possibilité d’un objectif non atteint en fin de traitement. Je fais attention à m’attaquer a des problèmes qui rentrent dans le cadre de mes compétences. Puis lors des séances je préfère présenter la résolution comme étant en cours, on y va touche après touche, jusqu’au moment ou il sent le changement et là on entrevoit la lumière au fond du tunnel, il ne reste plus qu’à conclure, programmer un renforcement. Et si malgré mes efforts l’objectif n’est toujours pas atteint il me faut laisser ouverture et espoir pour qu’un jour quelqu’un règle la question.
Commentaires