J’avais envie d’aimer ce livre. J’avais envie de pouvoir
revenir sur les propos peu encourageant que j’avais tenu sur les deux jours de
stage faits avec l’auteur et pendant les trois quart du livre j'ai vraiment cru qu'on allait pouvoir y arriver.
Certes dès les premières pages il y avait des propos sur
lesquels mon esprit refusait d’accrocher. Fatigue ? Déficience
cognitive ? Incident isolé ? J’ai persévéré et j’ai trouvé un certain
plaisir à lire les premières parties du livre : « sortir de la grotte »,
« de l’idée d’être tout seul » et « la spiritualisation de
l’égo ». En mode Rambo spirituel, l’auteur utilise de très courts
chapitres pour tailler un costar à l’égo, aux vieilles religions comme au nouvelles
mouvances. Il se montre précis et incisif quand il s’attaque au « travail
spirituel », aux « épreuves », etc. C’est un bon travail de
synthèse de ce qu’il a pu dire jusque-là dans ses premières conférences
disponibles sur Youtube, mais ce sont des choses qui doivent être écoutées
encore et encore pour qu’elles pénètres l’esprit et lui donne un peu de clarté.
C’est un joli travail de destruction et mon petit côté punk
a apprécié : vive le feu. Le problème c’est qu’une fois qu’on a tout
réduit à un champ de ruine qu’est-ce qu’on fait ?
« L’ultime effort est de ne rien faire, mon petit
padawan.
- Oui mais, mec, là je suis dans un champ de ruine
- Sens l’amour, l’amour est partout. Il n’y a rien à faire tu
es déjà divin, pas de ligne à traversé, tu es déjà arrivé.
- Mec, ça ne règle pas mon problème, où est ce que je dors ce
soir ?
La lecture de la dernière partie du livre : « le
feu de l’esprit » fort pénible pour moi. Tous les mauvais moments qui
avaient précédés mais qui avaient été noyés dans autant de phrases claires sont
remontés à la surface. J’imagine que la réception de cette partie doit dépendre
de la personnalité du lecteur, mais pour moi ça n’est vraiment pas passé. J’ai
trouvé ça extrêmement vague, pleins de jolis mots, ça sonne poétique… l’auteur
fait de belle bulles de savons mais au final en ce qui me concerne c’est du
vent. Pour illustrer mon propos voici deux exemples
(P278)
« La notion d’absolu n’existe que
par rapport à celle de relatif.
La quête d’absolu en tant que motivation intrinsèque d’une
existence peut mener à une profonde déception s’il n’est pas vu que l’absolu
contient tout et n’est donc pas ailleurs, ni plus haut, ni plus tard.(Ça veut
dire quelque chose ? Quelque chose d’utile ?)
L’amour contient la haine, la joie contient la tristesse, la
paix contient le chaos,…, et l’absolu contient le relatif. » (je veux bien
qu’on élargisse le sens de certains mots, mais là on frise le délire)
(P284)
« L’Esprit est origine. L’Esprit est pouvoir. L’Esprit
est vibration. L’Esprit est puissance. S’unir avec l’Esprit est s’unir avec ce
qui contient. Nul effort n’est à fournir en ce but. Il n’y a qu’à accepter son
existence partout ou régnait l’idée de séparation et de solitude.
Ok, pour le début ça sent la reprise de « je suis l’alpha
et l’oméga » de YHVH produit par Jean pour son album « Apocalypse »…
pourquoi pas, un classique reste un classique, le souci c’est qu’il s’est
écoulé deux millénaires entre les deux versions, et que le petit Gregory n’apporte
pas grand-chose au propos, en fait c’est même le contraire (donner trois
exemples pour caractériser un groupe et proposer ça comme autant d’équivalences,
j’ai les yeux qui saignent). Ce n’est pas rédhibitoire, on ne va pas le noyer
pour ça. Pour la suite par contre, la fameuse union avec l’esprit, on retombe
dans le problème de la conférence (voir article) si les conseils donnés peuvent
être des conditions nécessaires, elles ne sont en rien suffisante. Non, ne rien
faire, étendre sa conscience et sentir à quel point on est lié à tout, désolé,
mais ça ne marche pas pour moi.
J’ai bien conscience que c’est très subjectif tout ça,
personnellement des que le langage se fait vague et général je décroche complètement. Pour moi
ça n’a pas de sens, ou en fait ça a le sens que tu veux bien mettre derrière. C’est
un discours de politicien et de manipulateur. On te tend un miroir et
finalement tu finis par ne voir que toi-même et tes croyances (si tu es d’humeur
coopérative).
C’est subjectif, mais franchement ? L’Esprit est
origine… Franchement… Mais qu’est-ce que ça veut dire ? Ce qui m’amène à
mon dernier point : langage et contexte. Ce qui permet de faire sens de
ces mots brouettes (des mots vides dans lesquels on peut mettre un peu ce qu’on
veut), c’est l’utilisation colloquiale, celle que « tout le monde utilise
tous les jours » et dans ce livre ça dérape complètement. L’amour dont on
parle dans ce livre ce n’est pas l’amour de la petite copine ou des spaghettis,
c’est un amour spirituel, et il en va de même pour une poignée de concept.
Personnellement ça me chiffonne un peu, ça crée des chevauchements et des
court-circuits dans mon esprit. On vit avant tout dans le monde réel et terre à
terre, et si une perspective spirituelle donne du volume à l’ensemble et une
certaine profondeur, notre conscience évolue généralement sur des strates
profanes. On a généralement un travail, une relation de couple, des collègues,
des courses, des tâches ménagères, le genre de choses pour lesquels l’unité
avec l’univers n’est pas la solution immédiate. L’auteur en a conscience, et à
plusieurs reprises, alors qu’il visite différents concepts spirituel il
reconnait qu’il peut y avoir un monde entre sa version et celle qu’on rencontre
au jour le jour. Des fois on ne peut pas répondre à une insulte, une agression,
un vol ou pire par un sourire et en reconnaissant la divinité de l’autre et la
manière dont il nous propose un miroir pour nos problèmes un brin refoulés. L’auteur
le reconnait mais ne s’y attarde pas, il préfère repartir dans ses grands
principes plutôt que de donner un exemple, ou quelque chose qui relève d’une
méthode (qui, oui, à terme peut être limitante, mais qui est tellement
bienvenue pour se mettre sur les rails)
Personnellement j’aurai préféré pour chaque petit chapitre,
un mantra ou une petite maxime, une explication et un exemple concret. Me voyant
écrire ça… je me dis que mon approche est très analytique, très cerveau gauche,
et donc elle a un peu les caractéristiques de ce mental cet égo dont une des tâches
les plus importantes est de remettre à sa place, le remettre au service de l’Esprit
(mmmh, voilà qui est bien vague… un exemple ! un exemple !) et d’une
certaine manière ce que je suis en train de faire correspond à un point qui
revient au moins à deux reprises dans l’ouvrage. L’égo est très fort pour
diviser, comparer, hiérarchiser, il est une belle scie, mais pour recoller il
est pour le moins inopérant.
Donc voilà j’ai fait un ou deux tours sur moi-même, et me
revoilà devant le même problème… ce feu de l’esprit, ce dernier quart du livre… et bien j’ai rien compris que je ne puisse utiliser concrètement.
J’imagine que ça parlera à bien des gens mais pour moi, non je n’entends rien à
l’approche de l’auteur. Peut-être qu’il me faudrait plutôt une métaphore, un
conte, une belle histoire comme celle de Carlos Castanedas et de Don Juan.
Commentaires